Venu perturber le rap comme on balayerait un nid de fourmis, Tedax Max a enchainé en 2021 les sorties de ses mixtapes Forme Olympique.
En duo avec son groupe Naz’Clik pour ses début, Tedax Max se présente solo fin 2020 dans une ambiance sombre avec le morceau ” Maxaveli “. OG Max définit son univers musical du côté de New-York, même s’il garde une attache au 3ème arrondissement de Lyon. Humble & Affamé, ses ambitions lui ont apporté plusieurs opportunités avec l’enregistrement d’un Colors ou encore avoir pu représenter la Nike Air Max BW « Lyon » lors d’une campagne Nike.
Celui qui se sent comme « Jay-Z sans les followers », a profité de 2022 pour défendre la trilogie de ses mixtapes Forme Olympique. C’est à l’occasion de son passage au festival Hip Opsession qu’on a eu pu échanger sur son rap, le développement de la scène lyonnaise mais aussi de ses projets à venir…
Avec la sortie de tes trois projets Forme Olympique, tu as réalisé un très bon run. Quel bilan fais-tu de l’année 2021 ?
C’est une bonne année ! J’ai pu bien me présenter. On est arrivé fin 2020 et début 2021 avec nos projets. Il nous arrive beaucoup de trucs cool. On a pu faire le Colors, des apparitions dans le magazine Yard. C’est l’année qui a lancé le truc.
En 2022, tu as été moins présent. Cette année t’a permis de défendre tranquillement ta musique. Tu ressentais le besoin d’une pause pour préparer la suite ?
2022, on préparait des trucs mais le projet a découlé sur de la scène. On a pas mal défendu le projet sur scène. C’était aussi nouveau pour nous. Ça nous a permis de défendre le projet sur scène et de préparer de la musique à côté.
Mais, 2022 n’est pas encore fini… Il y a des trucs qui se préparent depuis un moment, je ne sais pas exactement comment ça devrait sortir mais l’année n’est pas finie donc il faut rester sur ses gardes.
Au fil de la construction de ces trois projets, est-ce que ton processus de création à évoluer ?
En 2020 on est arrivé avec une série de clips (série de freestyles ” Vite fait “, ndlr). À ce moment-là, à part des sons du premier projet Forme Olympique, rien n’avait été enregistré sur la suite. Tout a été enregistré courant de l’année 2021, on a enchaîné sur le moment. Je bosse toujours de la même manière. On a nos propres locaux, on a pris le temps de se structurer un peu ailleurs. Début 2023, on va pouvoir être bien présent.
Tu as des pochettes iconiques, dont le deuxième fait penser à celles de Juvenile ou Master P. La pochette du troisième projet dénote des autres. Quelle intention y avait-il pour la dernière pochette ?
La première et la seconde, on s’est inspiré des musiques de New York du côté de Griselda qui eux aussi jouent beaucoup sur ce genre de cover là. Que ce soit des peintures, des allégories, qui retravaillent à leur façon. J’étais grave inspiré de ça pour la première cover. La seconde, j’ai voulu rester dans le même thème, mais vu qu’au niveau des sonorités ça changeait un peu, il y avait ce côté un peu plus sud (des États-Unis, ndlr) au niveau des prods, je voulais retrouver cette ambiance dans la cover. Donc quand tu me dis Juvenile, Matser P, ce sont des bonnes références. Tu tapes juste. On a bossé avec Danshi Zen pour la cover du deuxième.
Et la troisième, pour moi ça cassait le truc. C’est back to basics. Depuis le premier projet, les gens ont senti mon influence New Yorkaise-East Coast. Je n’avais pas vraiment posé dans ce registre-là, mais dans l’exercice, on ressent que je suis un mec de cette école-là. On ne m’avait jamais vraiment vu dans cet univers. Dans le second, il y avait cet univers un peu sudiste. Pour la troisième, je voulais qu’on ressente vraiment mes influences premières.
Les deux premières, ce sont des personnes blanches qui sont représentées. Pour la troisième, c’est une personne noire.
C’est parce que le projet est plus sombre ! Je voulais représenter le truc différemment. Après il n’y avait pas vraiment de calcul par rapport à ça.
C’est vrai que sur les premières il y avait des personnes à la peau blanche. Dans ma recherche d’image, j’ai voulu voir s’il y en avait avec des noires. C’est en faisant mes recherches dont je suis tombé sur celle de Final Season. Je voulais apporter ça, je trouvais que c’était bien différent. Même le projet, en termes de couleurs, est différent des deux autres.
Tu as collaboré d’une certaine manière avec le rappeur Sidisid car le groupe Butter Bullets a produit plusieurs morceaux de Final Season. Tu peux nous raconter la genèse de cette connexion ?
Ça s’est fait via les réseaux, comme beaucoup de mes connexions. Ça s’est fait naturellement.
Puis, ce qu’ils me proposaient en termes de prods correspondait à ce que je préparais pour Final Season. Il me demandait si j’aimais les prods du style Roc Marciano, des références qui me parlent !
Le dernier morceau de Finale Season répond d’une certaine manière au premier morceau de Forme Olympique, on te trouve plus serein sur ” Premier dimanche du mois “ mais avec la même détermination de ” J’escalade “. Y avait-il une volonté de bouclé cette trilogie ?
Il n’y avait pas vraiment cette volonté. Mais tu vois, je n’avais même pas fait attention à ça. Ton analyse est bonne. Qu’on commence avec un morceau qui tape et terminer la trilogie avec un morceau comme ” Premier dimanche du mois “. C’est comme si tu écoutais la trilogie à la suite, on remarque une cohérence. Ça fait que du début à la fin, on commence fort et petit à petit on continue d’escalader jusqu’à ” Premier dimanche du mois “. Mais il n’y avait rien de volontaire, même moi je n’avais jamais fait le rapprochement.
La ville de Lyon connait un nouvel essor ces dernières années. Qu’est-ce qui a permis, selon toi, que la scène rap de Lyon passe au stade supérieur ?
Je pense que les réseaux ont ouvert les choses, et il y a eu la nouvelle génération… À Lyon, on avait un mental et une façon de faire qui était bien propre à nous qui était compliqué de comprendre pour des gens de l’extérieur parfois.
Les jeunes de maintenant, ils ont une autre vision, une autre façon de faire. Même moi, ce sont des plus jeune qui m’ont mis dedans. Quand j’ai vu des mecs comme Ashe 22, quand je check leur Insta, ils ont 15 milles followers, un autre fait un million de vues. Je me dis : « Wesh les mecs, comment ça se fait ? ».
En fait, c’est que les gars, à partir de leurs réseaux, ils m’ont ouvert les yeux sur le fait qu’on peut faire les choses par nous-même. Tu n’as pas besoin de connaitre untel ou untel. Les plus jeunes grandissent avec cet outil-là, il y a plus de personnes à l’aise avec ça.
Donc déjà ça change, et les mentalités avec. Que ce soit en termes de musique, peu importe le registre, aujourd’hui il y a des rappeurs qui ont des gros noms à Lyon et dans plusieurs registres différents. Que ce soit pour de la drill, des sons types Jul. Tout le monde s’entend bien, tout le monde se côtoie bien. Tout le monde arrive à manger, à s’en sortir. Donc je pense que ça donnera plus la niaque à des petits qui sont encore plus chauds qui vont arriver à l’avenir. Alors que nous on avait un mental différent et une vision différente ; qui était moins connue, c’était plus fermé et il y avait moins de visibilité sur la ville.
Dernièrement, un modèle de la Nike Air Max BW « Lyon » est sorti. Tu as eu l’opportunité d’être présenté dans un teaser pour cette paire.
Là j’en porte une mais ce n’est pas celle de la pub (rire). Nike avait fait une modèle « Lyon » parmi trois villes avec Rotterdam et Los Angeles. Chaque ville avait une histoire un peu spécifique avec la paire en question.
Et c’est vrai qu’à Lyon, dans les années 90’, tu voyais tout le monde avec ça. Quand je suis rentré en sixième, fallait absolument que j’aie cette paire-là ! Et après c’est vrai que ça a disparu un peu, pendant un moment ils ne faisaient plus cette paire. Le fait qu’ils remettent ça aux goûts du jour c’était lourd ! Puis avec l’application Nike SNKRS, ils ont pensé à moi pour faire la pub de la paire. C’était en collaboration avec une boutique, la seule boutique de la ville qui la vendait.
L’opportunité s’est faite comment ?
Les réseaux ! Après c’est passé par les gars de la boutique Gallery Shoez. Eux, c’est une boutique bien branchée, qui sortent les paires bien hypes. Ils sont bien reconnus à Lyon, bien en place. Ils ont dû avoir la connexion, on leur a demandé un profil qui correspondait bien avec la paire.
Ça te rapproche de ta phase « Je veux signer chez Nike comme Skepta et Nocta » sur ” Ambroisie et Nectar “.
Ouais c’est ça ! On a eu de la chance, bien qu’on soit des petits artistes. On a eu des grosses opportunités quand même ; on nous voit sur l’application Nike, on a eu la chance de faire un Colors. Que des opportunités assez grandes. En tant que petit c’est valorisant et encourageant pour la suite. Ça montre que les gens s’intéressent à ce que l’on fait, ce qu’on dégage est qualitatif. C’est une fierté !
Tes débuts dans le rap ont été motivés par l’écriture ou l’exercice de rapper ?
Au début je pense que c’était l’exercice. Je suis né dans les années 90, j’ai grandi avec un autre rap. Donc nous, l’écriture c’était vraiment important. Je savais que si demain je devais rapper, l’écriture allait être importante. Je ne pouvais pas rapper s’il y avait un bon flow avec des paroles éclatées. À l’époque c’était vraiment important. J’ai commencé le rap en retard, à 18 ans. Ça s’est fait naturellement, on n’avait jamais rappé mais tu sais c’est comme si on avait toujours rappé. On était vraiment des passionnés de musique, j’achetais des magazines, je me documente sur le rap, c’est naturel. Je l’aurais su si je n’étais pas fait pour rapper, je n’aurais pas continué. Je pense être suffisamment objectif. Un moment je rappais pour l’exercice sans chercher à enregistrer des morceaux et faire des clips.
Pour le morceau ” 3 MIC “ avec Prince Waly et Infinit’ sur la tape de 1863, y avait-il une sorte de compétition au studio au vu du profil de chacun ?
Je pense qu’il devait y en avoir mais c’était tranquille. C’était la première fois que je rencontrais Infinit’ et Prince Waly. Pour moi ils sont big ces gars-là, ils sont déjà en place. Moi, c’est ma première collaboration avec des gens vraiment en place, et surtout ils sont dans le même rap.
Quand on s’est rencontrés, ils m’ont dit déjà connaitre ce qu’on faisait, ça fait grave plaisir. Après, l’ambiance était détendue : entre fumette, causerie, Play. J’ai posé en premier, après ça a glissé. Je sentais que les gens attendaient de voir ce dont j’étais capable, car tout le monde ne me connaissait pas.
On peut s’attendre à une autre collaboration entre vous ?
Ouais je pense ! Ce n’est pas à exclure.
Il y a des rappeurs de la nouvelle génération que tu écoutes ?
So La Lune, j’aime bien ce qu’il fait ! J’avais du mal avec le style. Autour de moi, j’ai beaucoup de monde qui écoute sa musique comme Kon Queso (beatmaker ayant notamment collaboré avec Tedax Max ou So La Lune, ndlr). Sa musique est beaucoup revenue à mes oreilles, et j’ai appris à kiffer. Même humainement !
Dans mon univers il y a plein de choses qui me plaisent. Le rap que je pratique revient à la mode, on remet pas mal de lumière là-dessus en tout cas.
Ces derniers temps, on a un peu questionné la légitimité de faire du rap lorsqu’on ne connait pas les albums importants de cette musique. Toi qui proposes un rap old school, qu’en penses-tu ?
Comme on dit, faut vivre avec son temps. Je ne pense pas qu’aujourd’hui ce soit forcément nécessaire. Il y a plein de gens qui entrent dans la musique de manière différente. Après, il y a des bases à avoir. Aujourd’hui il y a un rapport différent à la musique. Je pense que pour certaines personnes, s’interroger est important. C’est nécessaire de connaitre ses classiques. Après, quelqu’un qui est réellement passionné, peu importe le temps qu’il faudra, il trouvera et il arrivera à son truc. S’il s’en fout, ça se voit.
Aujourd’hui, il y en a qui sont là parce que ça rapporte de l’argent. Il y a un rapport différent, tu peux faire de la musique qui ne te demande pas forcément d’être technique.
Je comprends qu’aujourd’hui c’est différent, je ne peux pas passer mon temps à faire l’aigri. Il ne faut pas rester focus sur ce qui ne nous convient pas. On peut aussi se complaire en se trouvant avec pleins de gens.