En 2016 sortait “Ooouuu” de Young M.A: gimmick accrocheur, allure assurée autant que sa thématique gay, le son avait alors été un énorme succès. Beyonce s’était emparée de la hype en proposant à la jeune rappeuse ni plus ni moins que sa première partie lors du Formation Tour. Young M.A sortait alors tout droit de Brooklyn, âgée de 24 ans et se retrouvait sous les projecteurs et les plumes des plus grands. Un an après, capitalisant à peine sur cet événement, un premier EP intitulé Herstory sortait. Si les sept pistes étaient prometteuses, le risque de faire une carrière éclaire à la Desiigner était bien réel. Il aura fallu deux ans à Young M.A pour sortir Her story in the making, un projet complet long de 16 titres qui sert de narrateur à son épopée sur un trône qu’elle revendique.
Her story in the making s’ouvre donc sur une intro des plus carnassière. Young M.A s’est peut-être faite attendre mais elle est bel et bien là aujourd’hui. Elle veut à la fois le Grammy, la reconnaissance et la front page de Vogue, “No Mercy” and no more time to waist. Mike Zombie à la production sur BIG vient lui offrir un tremplin pour montrer à quel point elle peut kicker. Young M.A s’est aussi faite remarquer par l’agilité et l’humour de ses punchlines. Quitte à ce que tout le monde lui parle de son homosexualité, autant qu’elle décide sous quelles formes. “Man I like them tatted bitches, Hi Khelani, hu” vient rejoindre la douce lignée des “three chicks, one bed now do the math” (Freestyle pour LA Leakers)
Sur une production de Zaytoven pour Kold World, Young M.A développe son évolution, les gens qui ne sont plus désormais la bienvenue, la pauvreté aussi et l’endurcissement qu’il faut impérativement effectuer si on veut arriver aux sommets qu’elle évoque tout au long de l’album.
Cet album sort aussi lors du 10ème anniversaire de la mort de son frère et imprégné dans ces titres de revendication et de confiance en soi imposés par le rap game se trouve cette tristesse et ce deuil. Sur un titre comme No Love où la violence de la rue semble demeurer comme incompréhensible ( Man, they left my brother dead on that pavement (On that pavement)
The same niggas he would hang with and bang with (What the fuck?)
And we claimin’ this gang shit (What?) pour elle. Sur Sober Thoughts elle détaille son addiction à l’alcool notamment pour tenter de surpasser l’enfermement et surtout le manque d’horizon par lequel elle est passé au cours de ces 4 ans depuis sa première exposition à l’intérêt public.
Foreign est probablement l’un des meilleurs titres de l’album. Il a cet équilibre parfait qu’à également le titre suivant, NNAN à l’exception du fait qu’il n’a besoin de personne d’autre. Parfaite alliance de mélodie et d’un jemenfoutisme si caractéristique à Young M.A, cette nonchalance qui se transforme en assurance et rend tout si charismatique. La montée en pression de son flow sur une production de NY Bangers qui ne cesse de se développer avec la réutilisation de son maintenant iconique “ooouuu” donne un relief au son, les basses servent un flow caméléon et on obtient un banger qui mettra tout le monde d’accord. NNAN fait entrer dans l’équation les deux seuls feat de cet album, Max YB et Relle-Bey.
Young M.A a donc pris le temps qu’il fallait pour construire un projet solide, cohérent et personnel tout en étant grand public. Le casting est soigné, les productions solides et l’absence de gros noms en featuring n’a que l’avantage de l’authenticité. Il y a bien sur des phases plus faibles, encore beaucoup de travail et de récits à vivre avant de pouvoir être racontés mais Young M.A apporte définitivement quelque chose au paysage rap et cette fraicheur n’a jamais été aussi charismatique.