STONES
Jewel usain – Où les garçons grandissent
Jewel Usain est un artiste que je suis depuis 2018, d’abord interpellé par la mise en scène et la réalisation impeccable, innovante et souvent drôle de ses clips, j’avais pris l’habitude de check chacune de ses sorties avec boulimie, mais son précédent opus « Mode difficile » m’avait clairement laissé sur ma faim.
Ceci étant dit, il est de retour avec un incroyable album : “Où les garçons grandissent… “, où on a le sentiment que rien n’est laissé au hasard, des thèmes à la réalisation, de l’orchestration organique à la cohérence, jusqu’à l’univers et la direction artistique qui en découle : tout est à sa place et fait sens ! On oublierait presque le côté technicien du rappeur, tant il a cherché à mettre le sens et la musicalité au premier plan. L’album est un no skip, le casting des invités est aussi pertinent que soigné, Prince Waly et Tuerie nous livrent des performances de haut standing.
Au niveau des thématiques, Jewel dresse un état des lieux de son ambition, de ses échecs et de ses envies. Ne s’inscrivant dans aucune mode, c’est selon moi le genre de projet qui traversera le temps et qui confirmera que Jewel est un des artistes les plus intéressants de ces dernières années.
F430 – Street Quality II
Malgré une technicité bien en deçà de mes standards, F430 est un groupe que j’affectionne particulièrement notamment grâce à leur sens de la mélodie et le désenchantement de leurs paroles, cher aux artistes des Tarterets.
Entre blues du dealer et ode au rap, bangers de rue et morceaux ensoleillés, une sincérité ainsi qu’une spontanéité exceptionnelle émane du duo. Les deux rappeurs dressent un décors sombre et poétique sans aucunes fioritures, souvent dans l’ombre des artistes de leur quartier, F430 gagne pourtant à être connu, notamment parce que chacun de leurs projets s’écoute de bout en bout sans peine, et ce “Street Quality II” ne fait clairement pas exception.
Léo SVR – SVR effect
À mon sens la découverte de l’année. Léo est le genre de rappeur en développement qui a tout pour devenir un grand nom. Technicien de qualité, adepte de l’écriture la plus sincère possible ainsi que des sonorités hyper novatrices, il a sorti deux projets extrêmement solides en 2023. Tout y est: punchlines, sens, humour, émotions et détermination.
Au détour d’un morceau, entre deux références au football des années 2000, on peut même entendre un sample de la prod de 7eme sens de ATK, ainsi que des samples vocaux de la Scred connexion ce qui nous fait comprendre que le MC a fait très sérieusement ses classes. Entre serpent et cie, tradition et modernité, c’est pour moi un des rappeurs qui incarne le mieux la nouvelle génération, affaire à suivre…
Malo – ID
Le problème avec Malo, c’est qu’un projet sur deux est moyen, après sa dernière sortie « 4×4 » je n’attendais plus rien de lui et ce fut une grossière erreur. Il nous livre avec « ID » son projet le plus abouti et complet, ce n’est pas le MC le plus pointu, mais sa musique est source de motivation et d’inspiration. Le choix des prods est à saluer tant on a peu entendu ce genre de délire auparavant.
Il fait sur ce projet beaucoup de tentatives artistiques et la plupart sont réussies. Le choix des invités est logique et apporte de la diversité ainsi que du caractère au projet. En clair, « ID » est une excellente surprise, foncez-y les yeux fermés !
Freeze Corleone – ADC
Pour moi “ADC” est un hybride entre ce qu’aurait du être « LMF » et un « Projet blue beam II » je m’explique. Si le premier album était remplie de featurings nécessaires pour asseoir l’image et l’univers du rappeur, il était cependant extrêmement indigeste, le second va droit au but avec une livraison de 13 titres avec un Freeze au top de sa forme, nous proposant ce qu’il fait de mieux: du rap sans concession.
La hype étant désormais passée et les innombrables featurings entre les deux projets ayant fait du mal à l’image de Freeze, il a fait le choix de revenir exclusivement en solo pour notre plus grand plaisir. Rien d’innovant ou de révolutionnaire tant sur les sonorités que sur les placements, mais ce n’est pas ce qu’on attend d’un artiste tel que Freezi F, on y retourne parce qu’on sait ce qu’on va y trouver : du salissime.
Je salue la cohérence de l’album, notamment grâce à la mise en place d’extraits d’archives sonores des polémiques entourant le rappeur.
Il a fortement travaillé la construction de ce projet et cela se ressent. Malgré l’engouement mitigé du grand public, « ADC » est un excellent album que les fans de la première heure mettront en bonne place quand on reparlera de la discographie de Freeze Corleone dans quelques années.
KATHLES
Luidji – Saison 00
Après l’écoute de cet album, j’ai étrangement repensé à Ipséité de Damso. Bien qu’il y ait peu de similitudes, ces projets arrivent à un moment commun dans la carrière des deux artistes, basculant leur statut vers une notoriété plus grande.
Sur Saison 00 on découvre une introspection plus profonde que sur Tristesse Business : Saison 1. La délicatesse et la franchise qu’utilise Luidji pour regarder son enfance dans les yeux m’ont sincèrement touchée. Malgré le choix de la pochette que je jugeais trop évidente, elle à pris tout son sens après l’écoute de l’album. Et je pense que cette vérité que les albums avec une pochette d’enfant sont importants dans la carrière d’un artiste se confirme de plus en plus.
Varnish La Piscine – THIS LAKE IS SUCCESSFUL
Comme chaque fois, les projets de Varnish La Piscine ne me déçoivent pas. Et comme à l’accoutumée, ses projets sont accompagnés d’un univers visuel bien identifié. Sa signature musicale nous raconte l’histoire d’une imagination naïve et débordante dans laquelle j’aime m’évader. Les références qui parsèment sa musique cultivent ma curiosité, allant du hip-hop à l’électro et de Wes Anderson à Federico Fellini.
Son rapprochement avec Pharrell Williams symbolise une première consécration à sa carrière, j’espère que la suite sera tout aussi précieuse à ses yeux que ceux de ces auditeurs.
TIF – 1.6
Comme beaucoup, 1.6 était dans notre Spotify Wrapped. Pourtant, je ne me suis pas plongé dans ce projet dès sa sortie. En y revenant régulièrement au fil de l’année, j’ai principalement retenu les morceaux « DEMAIN C’EST B3ID » et « IL EST 2H ET TU ME MANQUES ». Mélanger du français et du derdja dans ses paroles est un exercice que je salue par la noblesse du geste et la manière d’assumer pleinement ses origines.Les vidéos de son concert à L’Élysée Montmartre m’ont motivé à me rendre à l’un de ses concerts à Rennes, et j’ai déjà hâte de le retrouver sur scène. En attendant, j’écoute le live session de 1.6.
Malo – iD
Ce que j’ai grandement apprécié à travers ce projet est la sensibilité des textes. L’honnêteté qui découle du morceau « MOI-MÊME » rappelle à quel point l’art favorise l’introspection sur des sujets personnels. Sur le titre « MÉDICATION », Malo raconte son implication dans sa musique ainsi que la rigueur qu’il s’accorde pour ne pas tomber dans certaines tentations. Une rigueur qui le guide et dans laquelle je me retrouve précisément. Définissant une sonorité qui lui correspond avec des beatmakers talentueux, Malo à aujourd’hui suffisamment de cordes à son arc pour viser le mille avec son prochain projet.
Zequin – RESCAPÉ DES RUES (RR 700FS)
Zequin a probablement été mon rookie de l’année. Et en même temps, j’ai l’impression que 2023 à permis l’expansion d’une nouvelle scène du rap avec des artistes comme Gapman, 2C ou Dafliky. J’avais survolé Zequin lors d’une interview avec Gabmorisson avant de véritablement l’écouter lors de la sortie du titre « DIFFÉRENT ». Peu de rappeurs inscrivent leur musique dans ce qu’il appelle la pain love, ça été une proposition musicale qui m’a instinctivement séduite. Son apparition sur le projet 24 de La Fève était évidente, l’alchimie est efficace. Sa productivité me laisse croire qu’on entendra parler de lui en 2024.
ELYAS
Niontay – Dontay’s Inferno
Personne n’avait la moindre idée de qui était Niontay le 25 décembre de l’année passée. Découvert au détour d’un featuring avec son cousin, le new yorkais MIKE, extrait de son premier projet aux influences tantôt straight outta la grosse pomme, tantôt floridiennes, parfois teintées par les basses de Detroit… La visite de l’enfer dure 23 minutes et le jeune Niontay en est le guide.
Earl sweatshirt & The Alchemist – VOIR DIRE
Tout le monde se souvient probablement de ce haut lieu d’injustices qu’était la cour de récré du collège : peu importe l’établissement et l’époque, elle est un lieu de vérités générales et immuables hors du temps et de l’espace, où se croisent des archétypes. Et tout le monde se souvient donc logiquement de ces deux geeks, assis sur le dossier d’un banc, se moquant du monde, en train de discuter à voix basse d’obscurs sujets avec un degré de précision absurde ne passionnant probablement qu’eux. Ces deux geeks ce sont Earl et Al qui, trois ans après avoir fait mariner l’internet mondial avec la rumeur d’un projet commun l’ont enfin sorti. Voir Dire, c’est en quelque sorte la revanche des nerds, le temps d’une récré.
Butter Bullets – JAZZ
Le retour des enfants maudits du rap français est toujours une bonne nouvelle : 15 titres de rap teigneux, une pochette déroutante signée Toshio Maeda très loin de l’esthétique jazzy d’Atlantic Records et autres Blue Note et des invités de choix. Les calculs sont bons, le rap de Butter Bullets c’est toujours des maths.“Tu trouveras pas plus chaud que ce qui sort de ma bouche”, Sidi Sid tu dis vrai.
Salimata – Salimata Presents : Ouch
Au premier jour de cette année 2023, Salimata a sorti son premier projet, via 10k, label de l’inarrêtable MIKE (encore lui). À la croisée des mondes de l’abstract hip hop et dans le sillage des “stars” de ce genre, qui forment plutôt son entourage, la new yorkaise ouvre une voie nouvelle dans cette esthétique. Découverte via l’excellent article de Gather sur cette scène hyperactive (https://gatherup.fr/2023/09/18/10k-laboratoire-de-labstract-hip-hop-de-demain/), il semblerait que Salimata ait encore quelques idées en tête pour 2024.
Serane & Surf Gang – SGPM
L’année d’Evilgiane et du crew Surf Gang a dû prendre place pour sa quasi totalité dans leur studio, à peu de choses près. Les deux producteurs new yorkais formant le duo Surf Gang ont sorti une quantité affolante de projets et collaborations en 2023 (mentionnons l’EP commun Fast 5 avec 454 et le single “Making the Band” d’Earl Sweatshirt). Finalement, rien d’étonnant à ce que leur premier collaborateur tout droit venu du pays de la baguette et du croissant soit Serane. Prise musique dans l’omelette du fromage, un goût de reviens-y.
MARS
Fervent auditeur de rap français, j’ai peu été rassasié par mon style de prédilection cette année, malgré de bonnes sorties. Je suis donc allé flâner du côté de la soul, de l’afrobeat et du R’n’B, et en naviguant entre le rap de la côte ouest et celui du sud des Etats-Unis. Finalement, cette sélection n’est que le reflet des ces escapades. Une équipe de marathoniens nourrie de multiples influences qui nous prouvent que l’excellence n’a pas d’âge.
C’est du côté de San Francisco que les routes de Larry June et The Alchemist se croisent. Affublé de sa plus belle casquette LA, le producteur infatigable s’installe sur le siège passager. Ensemble, ils nous invitent à rouler lentement, pendant les 45 minutes de “The Great Escape”. Le flegme du californien glisse sur des productions riches en basses et en samples d’un Alchemist sur qui le temps ne semble pas avoir d’emprise.
Au même titre que Gizo evoracci, leur hustle et leur productivité sont à saluer, là où pour Janelle Monàe, du temps a été nécessaire avant de nous offrir “The Age of pleasure”. Un beau message d’acceptation de soi de la part d’une femme qui n’a plus peur de vieillir, le tout sur une bande son tantôt trap, reggae ou afrobit. Des mélanges qui ne font pas peur non plus au baroudeur qu’est Gizo Evoracci, l’exception française de ce top avec “Playeurisme et Grâce” Accompagné de Balatch et Lili O, le natif du southside du 91 continue d’aller s’aventurer dans des coins encore trop peu explorés par le rap de français, proposant une musique de plus en plus élégante.
Ces artistes semblent ne jamais avoir été aussi libres qu’en 2023, où les frontières entre les genres s’amenuisent peu à peu. En témoigne l’afro Fusion de Burna Boy dans “I Told Them”, où l’Afrique de l’ouest rencontre l’Amérique dans un cocktail savoureux, avec un arrière-goût d’hommage à “Enter the 36 chambers”, le premier album du Wu-Tang Clan qui fêtait ses 30 ans cette année.
Ces artistes expérimentés connaissent l’histoire de leurs musiques, avec un regard résolument tourné vers le futur, à l’image de Killer Mike qui invite toutes les générations qui ont fait et font le rap du sud dans la grande fête qu’est “Michaël”. Le rappeur de Run the Jewels enfile son costume de pasteur pour nous raconter son histoire et celle de sa ville dans une célébration douce amer au teintes soul et gospel, perpétuant l’héritage du dirty south. Des infatigables, des exemples de motivation, de dévotion et de passion, mais surtout de la super musique.
Lucas
Gen – Gennifer
En 6 titres, Gen nous dépeint un monde extérieur médiocre, décevant, révoltant. Heureusement, il est sauvé de sa mélancolie par le rap, et surtout par son histoire d’amour qui sert de fil rouge au projet. Une musique sincère, hardcore comme une clope, qui laisse transparaître toute la sensibilité de Gen sur des prods à la frontière des genres.
Tuerie – Papillon Monarque
“Tuerie c’est d’abord Paul, un mec qui essaie d’être le pote le plus cool qu’on puisse avoir, un mec qui essaie d’être un père excellent, et maintenant c’est quelqu’un qui essaie de vivre ses défauts et qui n’essaie pas tout le temps d’être parfait. […] C’est toujours le même cocktail en fait : violence, poétique, et avec un zeste de douceur.” – Tuerie (documentaire du Prix Joséphine)
Aimez Tuerie correctement.
TIF – 1.6
L’EP “1.6” de TIF est bien plus qu’une simple collection de morceaux. C’est une symphonie qui harmonise les influences hip-hop, chaâbi et raï, reflétant la dualité culturelle de l’artiste. À travers des productions exceptionnelles, TIF nous guide dans son voyage émotionnel, de la nostalgie de son Algérie natale à ses aspirations inébranlables. Mention spéciale pour la live session disponible sur Youtube, c’est magnifique
Mairo – omar chappier
Sur “omar chappier”, Mairo impose son style sur des prods allant du boom bap à la jersey. Et quel style ! Le gars a trop d’attitude. Le flow, les références, les feats… Nan c’est trop. Je lance n’importe quel morceau, je bouge la tête. Qu’est-ce qu’il te faut de plus ?
Malo – iD
Entre des beats glaciaux et des moments de douceur, Malo se révèle dans un album introspectif. Avec des influences de son adolescence en France et aux États-Unis, l’artiste explore des thèmes profonds tout en poursuivant sa quête d’évasion, de succès et de paix spirituelle.
Les productions, conçues avec des beatmakers de talent tels que PLATINUMWAV et Senpai Katchy, ajoutent une couche supplémentaire à cet opus où le niveau de rap atteint des sommets.
JEUNEDOH
Jewel Usain – ou les garçon grandissent
Kelvin Krash – Harsh
TIF – 1.6
Malo – ID
Wallace cleaver – baiser
LUCILE
Jewel Usain – Où les garçons grandissent
Luidji – Saison 00
TIF – 1.6 (LIVE SESSION)
Kekra – Stratos
Daniel Caesar – Never Enough
NICOLAS
Luidji – Saison 00
H JeuneCrack – Matière Première
Malo – iD
Heskis – Plot Twist
6lack – Since I Have A Lover